Caravane Afrique de l’Ouest, qu’est-ce que c’est ?

La Caravane de la CGLTE-AO (Convergence Globale des Luttes pour la Terre, l’eau et les semences- Afrique de l’Ouest) est une coalition régionale ouest-africaine d’OSC, d’acteurs religieux et de mouvements sociaux qui relient les communautés dans une lutte commune pour la protection de leurs terres, de l’eau et des semences des agriculteurs pour et avec les communautés. La caravane est organisée pour apporter un soutien moral aux communautés qui résistent à l’accaparement de leurs ressources naturelles (terre, eau, semences) ou à la destruction de leur environnement, par le biais de visites de solidarité dans ces communautés et en leur donnant l’occasion d’être des acteurs plutôt que des bénéficiaires de l’activisme de la société civile.

Comment fonctionne-t-elle ?

Comme son nom l’indique, il s’agit d’une caravane d’activités (réunions publiques, parfois accompagnées d’une fête foraine) organisée dans des communautés confrontées à des cas concrets d’accaparement de ressources : accaparement de terres pour des investissements dans les produits agricoles, extraction de ressources naturelles, eau, projets ayant un impact négatif sur les communautés, avec la participation de représentants du gouvernement. Les communautés ont l’occasion de raconter leur histoire directement aux fonctionnaires du gouvernement avec des demandes spécifiques et les fonctionnaires ont l’occasion de répondre aux préoccupations des communautés.  L’édition 2018 de la Caravane a vu la présence de représentants du gouvernement au niveau des gouverneurs régionaux et des ministres, mais dans l’édition 2021, la Caravane a même eu l’occasion de rencontrer deux des présidents des pays qui se sont publiquement engagés à écouter les demandes des populations. Nous observons avec un vif intérêt comment ils vont tenir leur parole pour le peuple.

Quelles sont les demandes des communautés ?

Elles sont formulées dans le livre vert de la CGLTE qui est généralement remis aux représentants du gouvernement avec des variations spécifiques des communautés affectées. Les demandes portent principalement sur la mise en œuvre de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples et de la

Déclaration de Malabo sur la croissance et la transformation accélérées de l’agriculture en Afrique pour une prospérité partagée et de meilleures conditions de vie qui ont été ratifiées par les pays de la CEDEAO.

Fréquence de la Caravane

La caravane est organisée tous les deux ans et la première édition a eu lieu en 2016. La caravane 2021 est la troisième édition et devait avoir lieu en 2020 mais a été reportée en raison de la crise du COVID-19. Chaque édition suit un itinéraire de pays défini à travers des communautés locales impactées identifiées tandis que les délégations des autres pays de la CEDEAO et de la Mauritanie convergent à un point désigné pour la caravane. L’édition 2021 est partie de Gambie et passée par le Sénégal, la Guinée Bissau, la Guinée Conakry et la Sierra Leone.

Aspect unique de la caravane 2021.

  1. AEFJN, avec l’appui de la CIDSE (Alliance Catholique des Agences de Développement), a développé le Pèlerinage pour la Justice en ligne de la CERAO (Conférence Episcopale Régionale d’Afrique de l’Ouest) pour compléter la Caravane, suscitant ainsi une plus grande participation de l’Eglise à la Caravane. La Caravane devient ainsi une opportunité pour la CERAO d’écouter d’une nouvelle manière le cri des pauvres et le cri de la terre. Le pèlerinage de la justice en ligne a également une intention de plaidoyer interne d’inviter l’Eglise en Afrique de l’Ouest à être une Eglise plus à l’écoute. Il est toujours en cours et s’achèvera lors de la plénière des évêques de la CERAO en mai 2022 avec des messages sur ce qui a été vu et entendu pendant le pèlerinage aux évêques, les appelant à réfléchir et à agir sur cette expérience unique. Vous pouvez suivre le lien pour en savoir plus sur le pèlerinage de la justice en ligne.
  2. La caravane a fourni aux Eglises locales une occasion systématique d’évaluer leur engagement en matière de plaidoyer au-delà de la rhétorique de la chaire.
  3. Engagement des services d’un réalisateur de films qui a mis en évidence, par le biais de courts clips vidéo, les voix des communautés, en accordant une attention particulière à la participation des Eglises locales au Pèlerinage pour la justice en ligne de la CERAO. Ces vidéos ont été téléchargées sur la page Facebook de la CERAO liée à la page Facebook des conférences nationales et de certains diocèses. Des clips vidéo pertinents se trouvent également sur la page Facebook d’AEFJN.
  4. AEFJN a offert à la CERAO des réflexions intermittentes de la Caravane attirant son attention sur des questions d’importance pratique pour les engagements de plaidoyer de l’Eglise dans la CEDEAO. Certaines de ces réflexions ont été publiées sur les pages Facebook de la CERAO et d’AEFJN respectivement, tandis que d’autres ont été mises de côté pour aider la CERAO dans ses futurs plans de plaidoyer.

Motivation de la participation d’AEFJN à la Caravane

La participation d’AEFJN à la Caravane est motivée par son engagement dans son plan de travail 2019-2022 en faveur d’une stratégie de plaidoyer multi-niveaux axée sur l’Afrique :

– Promotion du plaidoyer mené par la communauté africaine

– Facilitation de la collaboration entre les acteurs d’églises et les acteurs non-confessionnels dans la plateforme Notre terre est notre vie (OLOL).

– Promotion d’un plaidoyer collaboratif Nord-Sud.

Résultat de la caravane

  1. Il y a une implication progressive de l’Église en Afrique de l’Ouest dans le mouvement de plaidoyer mené par les communautés.
  • En 2018, seule Caritas Togo était impliquée dans les activités de la caravane.
  • Dans l’édition 2021, trois Caritas nationales ont été impliquées (Gambie, Guinée et Sierra Leone) dans les activités de la Caravane. Cependant, ce qui ressort de la participation de l’Eglise est la participation personnelle et physique de l’évêque de Banjul au lancement de la Caravane à Banjul. En outre, l’évêque a invité les représentants des délégations à dîner après le lancement de la Caravane. Les radios nationales et catholiques étaient en effervescence à propos des activités de la Caravane en Gambie. L’Eglise et les acteurs du mouvement social ont tenu des conférences de presse conjointes, des interviews radio sur l’accaparement des ressources en Gambie. L’implication de l’Eglise en Sierra Leone a énormément aidé la Caravane à traverser des moments très difficiles dans le pays. Mais le résultat le plus important est l’engagement de ces églises locales à poursuivre des engagements de plaidoyer en collaboration avec la société civile et les mouvements sociaux dans leurs pays.
  • Un nouvel éveil dans la compréhension et la réalisation du ministère JPIC pour les Eglises locales qui ont participé à la caravane.
  1. L’édition 2021 de la Caravane a permis de rencontrer directement les présidents de deux des pays qui se sont engagés à écouter le contenu du livre vert de la Caravane. Le gouvernement du Bénin a restitué les terres accaparées par les accapareurs locaux aux propriétaires communautaires et individuels en 2018 après la caravane et nous attendons avec beaucoup d’espoir que certains des engagements publics des gouvernements lors de la Caravane 2021 portent leurs fruits.
  2. Lancement très réussi de deux dossiers (Policy Briefs) sur des cas d’accaparement de terres impliquant des entreprises de l’UE en Sierra Leone, avec la participation de certains fonctionnaires de l’UE et du gouvernement national de la Sierra Leone.
  3. Le Secrétariat de la CERAO collaborera avec la CGLTE et d’autres OSC pour un événement de plaidoyer commun au Secrétariat de la CEDEAO à Abuja en janvier 2022.
  4. La décision d’organiser un sommet des peuples africains pendant le sommet de l’UE-Afrique en février s’est élargie pour inclure le mouvement des agriculteurs de base d’Afrique orientale et australe. La caravane catalyse également l’initiative de rassembler les mouvements sociaux des régions d’Afrique centrale et d’Afrique du Nord afin de créer un mouvement commun des peuples africains pour protéger les ressources de l’Afrique et reprendre l’Afrique des mains des accapareurs de ressources.

Défis

L’un des principaux défis d’AEFJN dans la Caravane est l’absence de participation des communautés religieuses locales dans les luttes des communautés locales. Le Secrétariat a fait de grands efforts, sans succès, pendant les phases de planification, pour entrer en contact avec les personnes JPIC locales et les communautés des Congrégations membres par l’intermédiaire des personnes de contact à Rome, mais sans succès. Ma rencontre personnelle avec quelques-uns d’entre eux pendant la caravane montre une déconnexion entre ce que les congrégations font au niveau international et ce que leurs communautés font au niveau local, de la même manière que l’Eglise institutionnelle est déconnectée des communautés ecclésiales locales. Il ne sera pas possible pour AEFJN de poursuivre un plaidoyer axé sur la communauté sans l’implication des communautés religieuses locales. Il serait utile que les personnes de contact reconnaissent cette lacune et redéfinissent la stratégie avec le Secrétariat sur la manière de la combler. Un plaidoyer axé sur la communauté pour renforcer la capacité des peuples africains à apporter le véritable changement que les gens souhaitent.