(EUROPE) Une délégation de representant.e.s Massaï a conclu une tournée de deux semaines en Europe, au cours de laquelle elle a rencontré des representant.e.s du gouvernement et de l’Union européenne (UE), des groupes confessionnels et des organisations de la société civile en Allemagne, en Autriche, en Italie et en Belgique. La délégation avait pour objectif d’obtenir un soutien international contre les expulsions en cours dans les régions de Loliondo et de Ngorongoro, dans la région d’Arusha, en Tanzanie. Cette tournée de sensibilisation a suscité une importante vague de solidarité de la part des représentants européens.
Les expulsions forcées contraignent des dizaines de milliers d’éleveurs massaï à quitter leurs terres ancestrales, perturbant leur mode de vie traditionnel et menaçant leur existence. Les membres de la délégation ont exposé leur situation critique sur la scène internationale car leur liberté d’expression est sévèrement limitée en Tanzanie.
Ils ont également attiré l’attention sur le lien indirect entre les fonds européens qui soutiennent des projets de conservation de la nature en Tanzanie et les violations des droits humains qui en résultent pour le peuple Massaï. Le gouvernement tanzanien justifie ces expulsions par des efforts de conservation de la nature mais la délégation massaï a souligné l’existence d’autres intérêts, notamment le tourisme et la chasse aux trophées. Elle a appelé l’UE à conditionner son financement au respect des droits humains : « Si vous ne pouvez pas garantir que votre argent ne soutient pas les violations des droits humains, gardez-le !
Au cours de leurs réunions en Allemagne, les membres de la délégation massaï ont demandé au Ministère de la coopération au développement, au Ministère des affaires étrangères et à l’organisation de conservation Frankfurt Zoological Society (FZS) de respecter les droits humains dans le cadre de leurs projets en Tanzanie. Ils ont également demandé qu’il soit mis fin aux expulsions forcées. La Frankfurt Zoological Society a nié son implication; quant aux représentants du gouvernement allemand, ils ont assuré qu’ils feraient part de leurs préoccupations au gouvernement tanzanien lors de futurs échanges intergouvernementaux. En outre, ils ont accepté de soulever cette question en priorité par l’intermédiaire de leur ambassade à Dar es Salaam. La commission des droits humains du parlement allemand s’est engagée à continuer à suivre la situation, par le biais de visites parlementaires en Tanzanie et d’un contrôle étroit des actions du gouvernement allemand.
La visite de la délégation en Autriche a donné lieu à des engagements similaires, le Ministère de l’environnement et le Ministère des affaires étrangères s’engageant à surveiller la situation, tandis que l’Ambassadeur d’Autriche au Kenya a également annoncé son intention de rencontrer la délégation massaï. La délégation s’est également rendue à Rome et a demandé au Vatican de porter leur voix.
L’UE, qui alloue chaque année 168 millions d’euros à la Tanzanie dans le cadre de partenariats internationaux, était la dernière étape de la tournée de la délégation. La Commission européenne, le Service européen pour l’action extérieure (SEAE) et le représentant spécial de l’UE pour les droits humains, Eamon Gilmore, ont assuré à la délégation qu’ils étaient conscients des problèmes et qu’ils continueraient à soulever la question des violations des droits des Massaï lors de leurs dialogues avec le gouvernement tanzanien. Plusieurs membres du Parlement européen se sont également engagés à étudier les moyens de déclencher rapidement une réponse humanitaire.
La délégation massaï a également engagé un dialogue ouvert avec l’Ambassadeur tanzanien auprès de l’UE lors d’une table ronde au Parlement européen. Au cours de cet événement, les membres de la délégation ont réfuté les affirmations présentées par les représentants du gouvernement tanzanien. En réponse, l’Ambassadeur tanzanien a nié les accusations et affirmé la transparence du gouvernement. Il a également invité le Rapporteur spécial des Nations unies sur les droits des peuples autochtones à se rendre en Tanzanie en 2024, ce qui n’a pas été possible au cours des dernières années. En outre, l’Ambassadeur a rassuré les délégués massaï en leur disant que leur sécurité ne serait pas compromise à leur retour.
Le courage des délégué.e.s à discuter ouvertement de leur situation en Europe, malgré le risque de représailles, a impressionné large champ de dirigeants politiques, d’institutions et d’organisations de la société civile européens. Un public plus large prend désormais conscience que la conservation et le tourisme sur les terres des Massaï devraient être entre les mains des Massaï eux-mêmes. En retournant en Tanzanie, les délégués massaï emportent avec eux un espoir renouvelé de solidarité internationale et d’action contre la crise actuelle des expulsions forcées à laquelle ils font face.
A propos du Forum des organisations non gouvernementales autochtones pastorales (Forum PINGO) :
Le Forum PINGO, fondé en 1994, est une coalition de plaidoyer composée de 53 organisations de peuples autochtones. Le forum travaille sans relâche en Tanzanie pour défendre les droits des communautés autochtones marginalisées d’éleveurs et de chasseurs-cueilleurs.
Cette tournée a été soutenue par un groupe d’ONG et d’organisations de la société civile solidaires du peuple Massaï. Elles s’efforcent de sensibiliser l’opinion publique, d’encourager la solidarité internationale et d’offrir une tribune au peuple Massaï, qui est de plus en plus criminalisé.
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