La morphologie extérieure du partenariat UE-Afrique donne une impression erronée d’une relation économique entre les deux continents qui ont connu des évolutions transformatrices, passant au fil des siècles de la prédation à la symbiose. Toutefois, un examen rapide de cette transformation apparente en dit plus long que ce que l’on pourrait croire. En principe, le partenariat favorise la prospérité entre les deux voisins, mais l’expérience de l’Afrique au cours des décennies de collaboration montre que c’est l’inverse qui se produit. Non seulement l’Afrique s’est de plus en plus appauvrie dans le cadre du partenariat, mais le continent ne comprend plus l’essence de la collaboration et la place qu’elle y occupe. Il va sans dire, à ce stade, que le partenariat est devenu un moyen légitime d’appauvrir davantage l’Afrique plutôt que de promouvoir sa prospérité. La décimale récurrente est l’effort constant et systématique de l’UE pour faire de ses préoccupations et de ses problèmes les priorités de l’Afrique dans l’élaboration des stratégies du partenariat face à l’incapacité institutionnelle de l’Afrique à s’engager dans le partenariat.

Il est évident qu’il serait très intéressant de savoir ce qui constitue un manque de capacité institutionnelle du côté de l’Afrique et qui fait qu’elle reste un outsider dans le partenariat. Il est certain que ce n’est pas tant un manque de personnes compétentes sur le continent que le manque de compétence institutionnelle de l’UA pour entreprendre les tâches de l’Afrique. L’UA est souvent appelée à négocier au nom des États africains tandis que l’UE négocie au nom des États membres, mais ces deux entités sont-elles sur le même piédestal ? Dès le début, l’UA n’a jamais été constituée pour jouer le rôle que l’UE et ses institutions jouent pour ses États membres, et l’UA ne peut donc en aucun cas être considérée comme l’équivalent de l’UE. Par conséquent, on attendrait indûment de l’UA qu’elle obtienne des résultats similaires pour les États africains, de la même manière que l’UE le fait pour ses États membres.

L’UA est une émanation de l’ancienne organisation pseudo-politique visant à libérer les États africains de leurs colons européens (OUA). En effet, l’UA peut présenter certaines similitudes morphologiques extérieures avec l’UE. Néanmoins, ses institutions sont sous-développées et ne sont pas structurées pour s’engager dans des négociations bilatérales efficaces au nom des États africains de la même manière que l’UE et ses institutions. Il est très instructif que l’UE qualifie le partenariat de partenariat UE-Afrique et non de partenariat UE-UA. Puisque l’UA n’est pas l’équivalent de l’UE, pourquoi l’UA se place-t-elle dans les négociations bilatérales entre les deux voisins ? Quel est l’intérêt d’engager ces pseudo-partenaires négociateurs au nom de l’Afrique si ce n’est pour donner l’impression d’une négociation bilatérale alors qu’il s’agit en fait d’une imposition unilatérale ? Ne s’agit-il pas d’un simulacre de justice internationale ? L’insistance actuelle des chefs africains sur la participation de leurs homologues de l’UE aux futurs sommets n’est-elle pas un indice subtil de l’erreur structurelle du partenariat ?

AEFJN a soulevé des objections à cette erreur dans différents espaces politiques et a souligné que l’asymétrie des entités de négociation doit être corrigée pour une collaboration juste. Dans l’un de ces espaces politiques, le responsable politique de l’UE présent a admis que « l’UE reconnaît les différences entre les entités de négociation et en assume la responsabilité ». Mais que signifie reconnaître et assumer la responsabilité du comportement de quelqu’un sans prendre d’autres mesures ? Il s’agit d’une question à la fois éthique et pratique. D’une part, cela peut signifier reconnaître une erreur involontaire sur le fondement même du partenariat. L’acceptation de ce déséquilibre conduira l’UE à mettre en place les mécanismes appropriés pour remédier à cette faille fondamentale.

D’autre part, reconnaître l’erreur et y rester indifférent est un choix délibéré pour maintenir le statu quo. Autant que nous le sachions, l’UE ne dispose d’aucun mécanisme pour souligner cette erreur inhérente au partenariat. Et à notre connaissance, cela ne sert pas les intérêts des deux voisins. Comme d’autres parties prenantes, AEFJN attend un flux d’actions positives de la part de l’UE pour remédier à la situation et consacrer une collaboration véritablement bilatérale. Ignorer la situation équivaut à jouer à l’autruche lorsque l’UE brandit ses bannières de porte-drapeau mondial de la vérité, de l’équité et de la justice.

Chika Onyejiuwa

AEFJN