L’impunité de la société belge SIAT dans la communauté de Famienkro en Côte d’Ivoire a été rendue publique en 2017 lors d’une conférence francophone co-organisée par AEFJN à Abidjan. Le cas de SIAT à Famienkro expose les impacts négatifs d’une acquisition de terres à plus grande échelle sans le consentement préalable et informé des communautés. Il est déchirant de constater que les gouvernements nationaux africains sont complices de l’impunité des sociétés transnationales (STN) dans leurs pays. Depuis l’acquisition forcée de la communauté de Famienkro pour la plantation d’hévéas par le gouvernement national de Côte d’Ivoire, ni les communautés affectées ni SIAT n’ont connu la paix. La perte douloureuse d’êtres chers lors des conflits fonciers, les déplacements de communautés, la perte de biodiversité et de moyens de subsistance sont quelques-unes des angoisses incessantes des communautés dues aux activités de la SIAT. Il est évident que certaines communautés au Nigeria et au Ghana subissent un sort similaire à cause de la société SIAT. Ensemble, ils seront en Belgique pour une tournée de lobbying en Europe du 12 au 24 juin afin de raconter leurs histoires à la population européenne.
Le cas de SIAT est l’un des nombreux cas rassemblés par la plateforme Our Land is Our Life comme preuves pour un instrument juridiquement contraignant de l’ONU pour arrêter les violations des droits humains et environnementaux des sociétés transnationales. AEFJN est heureuse d’avoir fourni le lien officiel de ce cas au groupe de travail belge sur la terre pour le niveau européen du plaidoyer qui organise cette tournée de lobbying. Les communautés auront l’occasion de raconter leurs histoires sur la plateforme de la société civile à Bruxelles et de tenir une session avec les parlementaires européens à laquelle le premier vice-président de RECOWA participera et prononcera les remarques d’ouverture. Cette réunion sera l’occasion d’entendre directement les communautés affectées par les activités des entreprises et de discuter de la nouvelle proposition de directive européenne visant à prévenir, cesser et atténuer les violations des droits de l’homme et les dommages environnementaux par les entreprises européennes. Les communautés se rendront également à Nuremberg, en Allemagne, pour suivre une formation sur les obligations extraterritoriales des obligations transnationales afin de renforcer leur capacité de lutte. Enfin, un événement public aura lieu à Zaventem à Bruxelles devant le siège de la société SIAT et un échange entre la direction de SIAT et les communautés est prévu.
Il est réconfortant de voir les communautés aller aussi loin, et AEFJN est fière de faire partie de leur lutte. Le Secrétariat sera impliqué dans leur mouvement tout au long de cette tournée de lobbying. Une note d’information sur l’affaire, co-rédigée par AEFJN et approuvée par SECAM, RECOWA et les Caritas de Côte d’Ivoire, du Ghana et du Nigeria, sera lancée. Le besoin sérieux de collaboration entre l’Eglise et le Civil, qu’AEFJN a souligné lors de la plénière de RECOWA en mai, porte ses fruits.
Certains membres du réseau ont demandé une justification pour la tournée de lobbying. En réponse, de nombreuses terres à grande échelle destinées aux plantations de palmiers à huile et d’hévéas en Afrique au cours des dernières décennies n’ont pas décollé, ont été réduites ou entièrement abandonnées en raison de la résistance rencontrée par les communautés concernées dans différents pays africains. La résistance de la communauté de Famienkro a jusqu’à présent réduit la plantation de caoutchouc de SIAT.
Les conflits fonciers sont coûteux pour les entreprises. Le grand nombre de projets de plantations industrielles de palmiers à huile en Afrique qui se retrouvent dans des conflits fonciers décourage les entreprises de poursuivre leurs investissements. La résistance à Herakles Farms, par exemple, a sans aucun doute influencé les décisions des entreprises alimentaires internationales, Cargill et Sime Darby, qui ont renoncé à poursuivre les plantations de palmiers à huile au Cameroun. Les critiques internationales adressées aux banques de développement pour avoir financé les plantations de Feronia en RD Congo ont peut-être incité ces dernières à refuser de financer d’autres projets de plantations industrielles de palmiers à huile en Afrique. Nous ne pouvons pas dire avec certitude quels projets ou combien de projets ont été abandonnés en raison des risques de conflits fonciers ou de résistance locale. Cependant, nous savons, grâce à notre expérience dans différentes luttes, que l’opposition a eu un impact significatif sur leurs décisions et leur capacité à faire avancer les projets de plantations industrielles. Suivez ce lien pour lire le Policy Brief de SIAT en Côte d’Ivoire
Chika Onyejiuwa, CSSp