Introduction

Les dystocies (c’est-à-dire les accouchements à problème) continuent à causer une importante mortalité maternelle dans les pays peu équipés, notamment en Afrique subsaharienne.

L’ocytocine est depuis longtemps utilisée avec succès pour le traitement de certaines dystocies et pour le traitement des hémorragies post-partum (c’est-à-dire des hémorragies survenant juste après l’accouchement) mais son utilisation est rendue délicate par son instabilité chimique et sa sensibilité aux conditions extérieures ainsi que par la présence sur le marché d’ocytocine de qualité inférieure ou dégradée.

Analyse

L’ocytocine doit être conservée à l’abri de la lumière et à une température allant de 2 à 8° (elle ne doit jamais être congelée). Non réfrigérée, elle perd progressivement son activité. Concrètement les gynécologues et/ou les accoucheuses qui ont posé une perfusion d’ocytocine de qualité inférieure sans le savoir à une parturiente (c’est-à-dire à une femme en train d’accoucher) pour un accouchement dystocique constatent que l’effet attendu ne se produit pas ;  ils/elles sont alors obligé.es, faute d’alternative, d’augmenter la dose d’ocytocine pour obtenir l’effet attendu, ce qui complique la prise en charge de la parturiente et augmente les coûts.

Des études ont été menées récemment au Nigeria et au Malawi pour tester la qualité de l’ocytocine administrée aux parturientes mais sans analyser les conséquences de l’administration d’une ocytocine de qualité moindre sur les parturientes.

En ce qui concerne l’activité des ampoules d’ocytocine mises sur le marché (les échantillons provenaient de pharmacies privées et de différentes maternités), l’étude réalisée au Malawi a révélé que, dans 11% des ampoules d’ocytocine analysées, le taux de produit actif allait de 82 à 87% par rapport à la normale ; un résultat relativement bon quoiqu’insuffisant.

En ce qui concerne la conservation de l’ocytocine, deux études ont constaté que des ruptures de la chaîne du froid se produisent aussi à la maternité elle-même.

Au Malawi, une enquête a trouvé un dépassement de la température de conservation de l’ocytocine dans 42% des sites non équipés d’un frigo mais aussi dans 33% des sites équipés d’un frigo.

Au Nigeria, une enquête a trouvé que seulement 52% du personnel interrogé savait qu’il fallait conserver l’ocytocine entre 2°C et 8°C.

Et lorsque les médecins ou les accoucheuses avaient des doutes sur la qualité de l’ocytocine employée, ils/elles déclaraient rarement le fait aux autorités sanitaires pour qu’elles prennent des mesures.

Recommandations d’AEFJN

L’inspection nationale de la pharmacie doit vérifier convenablement la qualité l’ocytocine proposée à la vente avant de donner l’autorisation de sa mise sur le marché.

Respecter la chaîne du froid pour conserver l’ocytocine – mais c’est aussi valable pour de nombreux vaccins et autres produits de santé – reste un défi majeur dans la distribution des produits de santé thermosensibles en Afrique. Elle suppose notamment des moyens, des connaissances et de la vigilance de la part d’un grand nombre d’intervenants jusqu’au niveau le plus périphérique.

La formation du personnel de santé à la conservation des médicaments et produits de santé thermosensibles est une priorité.

Les déclarations concernant la qualité douteuse des produits de santé faites par les hôpitaux et les centres de santé à la hiérarchie sanitaire sont à organiser ou à renforcer.

Christian Roberti

AEFJN Belgique

En savoir plus

2019 PlosOne Clinical experiences Poor storage Oxytocin Healthcare providers Nigeria

2020 BMC Quality Availability Storage Oxytocin Misoprostol Malawi