AEFJN a participé à la deuxième journée de réflexion Laudato SI organisée récemment par la CIDSE en collaboration avec la COMECE, le CCEE, le GCCM, le JESC et Justice & Peace Europe. Ce fut une occasion de discernement offerte par ces organisations d’Eglise pour garder vivant non seulement l’Esprit de Laudato SI mais aussi pour l’approfondir et l’aider à s’enraciner dans l’espace public. Depuis la publication de Laudato SI en mai 2015, l’encyclique a occupé une place prépondérante dans de nombreuses discussions écologiques. Cependant, AEFJN soutient que le plus important ce n’est ni la citation du document au cours de discussions publiques pertinentes, ni le développement de nouveaux concepts pour alimenter les débats publics, mais bien la prise en compte de ses valeurs et principes dans la formulation des politiques publiques.
Le Pape François n’a pas mâché ses mots dans son appel universel à un changement de mode de vie et à la transformation des politiques publiques par les valeurs que le document énonce comme la seule façon de sauvegarder notre environnement. S’il est vrai qu’il existe des initiatives incroyables inspirées par Laudato SI, il est également vrai que, compte tenu de l’urgence de la situation, ces initiatives sont insignifiantes pour constituer un poids critique qui déclencherait le changement souhaité. Il est encore plus inquiétant que le continent africain, qui est le plus vulnérable aux changements climatiques, ne semble pas réagir à la situation.
Le problème que Laudato SI aborde est notre problème humain commun, et nous avons une responsabilité collective envers la résolution de ce problème. Dans cet esprit, l’appel de Laudato SI comme clé du problème au changement de notre mode de vie est un impératif mondial. Ce qu’il faut changer concrètement, c’est la mentalité d’une vie centrée uniquement sur la logique de l’économie et de la consommation. Nous soulignons qu’un changement ne peut commencer que dans le cadre de notre compréhension de l’économie. L’économie est passée d’une science qui nourrit la vie à une science qui l’étouffe. Dans son sens grec original oikonomia, l’économie exprime la relation dynamique entre l’écosystème et la communauté humaine. Les experts ont donné deux nuances perspicaces d’oikos. L’une est celle d’une maison dans laquelle Dieu veut donner aux gens l’accès à la vie, et l’autre est une demeure de la création dans laquelle Dieu veut que les créatures vivent ensemble dans une relation productive et interdépendante. Le changement de mentalité implique une redéfinition de nos valeurs sociales et la construction d’une économie qui préserve les ressources naturelles et améliore la qualité de vie dans le sens économique original.
Chez AEFJN, dans le fouillis des prescriptions éthiques, nous épinglons comme la plus importante pour résoudre notre crise écologique actuelle celle qui s’appuie sur la responsabilité personnelle et l’obligation de rendre des comptes. Nous réitérons notre conviction que l’invitation à un changement de vie affecte directement les valeurs, le caractère, le mode de vie et les actions des individus et des institutions qu’ils représentent. C’est une invitation radicale à un impératif éthique. Bien sûr, tout cela engendre des défis même pour l’église. Pour une Église empêtrée dans des crises à répétition, le lancement d’une telle invitation peut sembler équivoque. L’Église doit cependant continuer à indiquer le bon chemin, même dans son état blessé. Avec le Pape François, l’Eglise doit brandir l’étendard selon lequel Laudato SI ne doit pas être réduit à une chicanerie sur les mots. Alors que les écrits de l’encyclique se répandent, ils doivent s’accompagner d’une révolution de masse entraînée par un changement correspondant de mode de vie.
[1] CIDSE= Coopération Internationale pour le Développement et la Solidarité
[1] COMECE= Association des Episcopats de l’Union Européenne
[1] CCEE= Conseil des Conférences épiscopale d’Europe
[1] GCCM= Global Catholic Climate Movement
[1] JESC= Jesuit European Social