Avec cet article, l’auteur veut signifier que l’AEFJN remet en haut de son agenda un ancien thème resté en veilleuse ces dernières années. Pourquoi rouvrir ce dossier?
Parce que le thème de la qualité des médicaments et leur accessibilité dans les dispensaires, hôpitaux et pharmacies est une question cruciale qui engendre une souffrance majeure pour des millions d’Africain.e.s.
Parce que c’est un business qui représente un marché énorme, en plein boom et où le manque de régulation à tous les niveaux, notamment au niveau de l’industrie pharmaceutique, des marchés financiers et des États du monde entier en ce compris l’UE, ouvre grande la porte à de profondes injustices économiques et à de graves activités criminelles aux dépens des populations africaines.
Donc ce thème concernera tant l’organisation des États pour assurer la qualité des médicaments que le marché et les relations économiques internationales qui influencent directement le prix des médicaments et leur disponibilité.
Dans ce premier article, nous arrêterons à la question de la qualité des médicaments menacée par les médicaments falsifiés ou les médicaments sous-standards.
Un médicament falsifié ou contrefait ou un faux médicament est un produit délibérément ou frauduleusement trompeur quant à son identité, sa composition ou sa source ; il lui manque ce qui caractérise tout médicament de qualité : la traçabilité et la transparence. La fraude se passe soit au moment de la fabrication et/ou de la distribution. Les médicaments falsifiés se retrouvent aussi bien dans les circuits formels qu’informels/illicites (marchés, boutiques, démarcheurs ambulants et de plus en plus sur Internet…). Le but des falsificateurs est de gagner de l’argent sans se soucier des conséquences sur la santé des consommateurs. Les médicaments falsifiés se placent toujours en dehors du contrôle des Autorités Nationales de Réglementation (ANR). Les conséquences pour les patients sont: empoisonnement, intoxication, absence d’efficacité avec aggravation de la maladie ou décès, résistance aux médicaments…L’importance de la falsification des médicaments ans les pays africains faiblement régulés peut s’élever jusqu’à 40% des médicaments mis à la vente. La falsification relève des autorités judiciaires.
Un médicament est dit sous-standard ou de qualité inférieure quand des défauts sont apparus involontairement ou par négligence pendant la fabrication et/ou la distribution. Il peut ainsi être surdosé ou sous-dosé, instable, non bio-disponible une fois absorbé par le malade, contaminé, non stérile, dégradé ou objet d’une erreur d‘étiquetage. Ces médicaments ont été ‘contrôlés’ par l’ANR et ont obtenu à tort un permis d’exportation ou une Autorisation de Mise sur le Marché (AMM) et ont donc un label de qualité aux yeux des malades. La faute se trouve le plus souvent au niveau du fabricant mais elle peut aussi être les mauvaises conditions de conservation et concerner la responsabilité des fournisseurs de médicaments, des pharmaciens et du personnel de santé; la question de la négligence pose la question du caractère délibéré ou non de celle-ci.
La dangerosité des médicaments sous-standards pour les malades recoupe en partie celle des produits falsifiés ; les médicaments sous-standards sont souvent moins efficaces et inducteurs de résistance comme ce qui se passe avec les anti malariens. Le nombre des médicaments sous-standards mis légalement sur le marché est estimé entre 10 et 20% des médicaments avec une AMM; en fait, plus l’ANR est faible (à cause d’un manque de personnel qualifié, d’équipement, de corruption…), plus les médicaments sous-standards passeront entre les mailles du filet. Combattre le phénomène des médicaments de qualité inférieure relève des ANR et du ministère de la Santé.
Christian Roberti
(à suivre)