Le 6e sommet UE-Afrique s’est tenu il y a environ un an à Bruxelles, conformément à la première stratégie commune Afrique-UE adoptée en 2007. Bien que la stratégie commune constitue un cadre politique global à long terme impressionnant pour les relations Afrique-UE, il reste à voir comment les sommets successifs et le plan d’investissement qui en découle ont contribué de manière significative à répondre aux aspirations des peuples africains. En effet, rien n’a changé dans la réorientation du modèle économique néocolonial qui a façonné les relations UE-Afrique au fil des ans, malgré le mantra de la construction d’un partenariat d’égal à égal entre les deux voisins, exprimé dans la stratégie commune Afrique-UE. Si le statu quo persiste, on peut se demander comment un partenariat d’égal à égal peut être mis en place. Pour construire un partenariat d’égal à égal, nous pensons que les éléments constitutifs de notre inégalité devraient être cartographiés afin que nous sachions ce qu’il faut ajuster pour réduire la disparité. Donner à l’Afrique une aumône en guise d’investissement ne résout pas les problèmes d’inégalité ; au contraire, cela les aggrave.
Les organisations confessionnelles de Bruxelles ont récemment remis en question le mantra de l’égalité lors d’une table ronde organisée au Parlement européen. Un député européen a insisté sur le fait que le partenariat devait être mesuré à l’aune du bien-être des populations. Selon lui, le plan d’investissement actuel de l’UE pour l’Afrique, communément appelé « Global Gateway », en est la clé. Le moins que l’on puisse dire, c’est que cette position ne peut être prise qu’avec une pincée de sel. Le programme d’investissement de 150 milliards d’euros du « Global Gateway » devrait être mobilisé par le secteur privé. Compte tenu de la propension des sociétés transnationales en Afrique à maximiser leurs profits sans tenir compte des valeurs éthiques fondamentales, tant humaines qu’environnementales, de la faiblesse des institutions démocratiques africaines pour les tenir responsables et du refus de l’UE de mettre en place des mécanismes solides pour les tenir responsables dans leur pays, on peut se demander comment ces entreprises deviendront soudainement les championnes des investissements centrés sur l’homme en Afrique.
Le manque de cohérence est une marque récurrente des programmes d’investissement de l’UE et de l’expérience des communautés africaines sur le terrain. En effet, le partenariat Afrique-UE promet un partenariat égal entre les deux voisins, mais l’incapacité de l’UE à joindre l’acte à la parole par le biais de la cohérence politique jette une ombre sur cet espoir. Rien de significatif ne changera dans l’association si les modèles commerciaux traditionnels servent de médiateurs à la collaboration. Nous pensons que le partenariat UE-Afrique doit s’engager sur la voie de la cohérence politique afin que la mise en œuvre de la fenêtre africaine du Portail mondial reste fidèle à ses principes.
En outre, la reconnaissance des différences de pouvoir entre les deux voisins a été observée comme un facteur limitant exceptionnel dans le voyage vers un partenariat d’égal à égal. Le différentiel de pouvoir favorise l’UE au détriment des communautés africaines et de leur environnement. Un bon exemple est la question de la connectivité numérique qui a d’énormes implications pour la terre, la perte de biodiversité et l’écologie. La connectivité numérique présuppose une éducation primaire ; il reste à voir comment elle profitera aux communautés rurales africaines qui n’ont pas encore acquis d’éducation de base. Dans les deux cas, les communautés africaines sont perdantes. En effet, la passerelle globale de l’UE est stratégiquement conçue pour continuer à plumer l’Afrique ; c’est un loup qui se fait passer pour un mouton.