J’étais encore à Heverlée chez nous avec mes consœurs pour la fête de Pâques ce lundi 21 avril quand je recevais la nouvelle du décès du Pape François.
Les drapeaux de l’Union Européenne hissés à mi-hauteur de leurs hampes.
Le lundi de Pâques étant férié, c’est donc le mardi 22 avril que je suis venue au bureau. Sortant de la gare de train de Bruxelles Schuman, l’atmosphère du deuil était bien visible avec tous les drapeaux de la commission européenne en berne, pour ne citer que cette institution de l’union européenne qui se situe juste en face de notre bureau. Oui, l’Union Européenne garde bien les souvenirs de ce Pape qui a entretenu d’une manière ou d’une autre la relation avec elle en l’évoquant dans certains de ses discours et surtout, par son allocution au Parlement Européen en France à Strasbourg le 25 novembre 2014. Le Pape François a entretenu une relation de dialogue et d’interpellation morale avec l’Union Européenne mais aussi une relation dynamique et parfois critique avec elle. Cet article est le fruit de l’inspiration après la relecture de ce discours franc et interpellant qui tiens jusqu’à ce jour.(1)
Le Discours du Pape François au Parlement Européen à Strasbourg le 25 novembre 2014.
« La précédente visite d’un pape auprès des institutions européennes remonte à 1988. À l’époque, Jean-Paul II venait à la rencontre d’un parlement où ne siégeaient que 12 pays. Le mur de Berlin n’était pas tombé. Depuis, l’Union européenne s’est élargie à 28 États. Et la sécularisation s’est renforcée. À cette crise existentielle s’est ajoutée une crise économique durable. À Strasbourg, le pape François a choisi de s’adresser à l’ensemble du continent européen.»(2)
L’allocution du Pape François à Strasbourg nous dévoile une figure morale incontournable sur la scène internationale, notamment à travers ses prises de position courageuses en faveur de la justice sociale, de la paix, et de la dignité humaine.
Un ton direct et prophétique
Dès les premières phrases, le Pape surprend par son langage franc et imagé. Il décrit l’Europe comme une « grand-mère, non plus fertile et vivante », mais « fatiguée », repliée sur elle-même, parfois incapable d’inspirer la jeunesse. Cette métaphore n’est pas gratuite : elle souligne une réalité actuelle spirituelle et morale sur une Union européenne qui semble avoir perdu l’élan des pères fondateurs.
C’était donc le lieu pour lui de rappeler à l’Europe ses racines humanistes et chrétiennes, l’exhortant à ne pas perdre de vue les valeurs de solidarité, de justice sociale et de respect de la dignité humaine.
Le Pape s’est inscrit dans la lignée de ses prédécesseurs et a rappelé à l’Europe ses racines humanistes et chrétiennes, l’exhortant à ne pas perdre de vue les valeurs de solidarité, de justice sociale et de respect de la dignité humaine.
La dignité humaine comme fondement
Le cœur du discours repose sur la centralité de la personne humaine. François plaide pour une Europe qui « ne tourne pas autour de l’économie, mais de la sacralité de la vie humaine ». Il critique les systèmes qui mettent l’être humain au service de la finance ou des technologies, et défend une vision intégrale du développement, enracinée dans la dignité et la solidarité.
Il souligne notamment les risques de marginalisation des plus faibles – les chômeurs, les migrants, les personnes âgées, les jeunes sans avenir – et appelle à des politiques sociales plus justes et inclusives.
Une Europe ouverte et solidaire
Dans son discours, le Pape François insiste sur la responsabilité historique de l’Europe en matière de solidarité, particulièrement face aux crises migratoires. Il dénonce l’indifférence et l’égoïsme national, plaidant pour une politique d’accueil fondée sur l’hospitalité, le dialogue interculturel et le respect des droits humains. Il exhorte l’UE à ne pas céder à la peur de l’autre, mais à redécouvrir sa vocation à bâtir des ponts, non des murs. Il invite l’Europe à « retrouver son âme » et à se réinventer dans un monde en mutation.
Le Pape François a eu des mots justes dans la dénomination des maux qui se vivent au sein de l’Union Européenne. Il apparaît comme un éclaireur dans l’obscurité des inégalités, des marginalisations et injustices que connait notre monde. Il stimule et redonne courage aux défenseurs des droits des marginalisés.
Les grands thèmes de l’engagement du Pape avec l’Union Européenne étaient:
1. Les migrations : Le Pape François critiquait régulièrement les politiques migratoires restrictives de l’Union Européenne, plaidant pour un accueil digne et solidaire des réfugiés, en particulier face aux tragédies en Méditerranée qu’il nomma plusieurs fois : « cimetière ».(3)
2. La justice sociale : Le souverain pontife encourageait une économie plus équitable et inclusive, dénonçant la logique du profit au détriment des plus vulnérables. Il appelait à une refondation éthique des politiques économiques européennes.
3. L’écologie : Avec son encyclique Laudato Si’, François a influencé le débat écologique au sein de l’Union Européenne, soulignant l’urgence d’une transition écologique fondée sur la justice intergénérationnelle et le respect de la Création.
4. La paix et la diplomatie : Dans un contexte de tensions géopolitiques, notamment avec la guerre en Ukraine, le Pape se posait en artisan de paix, appelant l’Union européenne à jouer un rôle diplomatique plus actif et moralement guidé.
Conclusion
La relation entre le Pape François et l’Union européenne était à la fois exigeante et stimulante. Par ses prises de position courageuses, le Pape s’affirmait comme une conscience morale extérieure, qui interpelle les dirigeants européens tout en nourrissant le débat public sur l’avenir du continent. Dans une époque marquée par les crises, son message résonne jusqu’en ce jour comme un appel à l’espérance et à la responsabilité collective. Le Pape affirme que l’Europe peut redevenir « une référence pour l’humanité », si elle retrouve le courage de ses valeurs fondatrices : démocratie, droits de l’homme, solidarité, justice.
Il appelle à un sursaut éthique et culturel, à une renaissance du projet européen fondée sur l’écoute, la responsabilité et l’ouverture à l’autre.
Le Pontificat du Pape François a beaucoup stimulé la défense de droit de l’homme et l’intégrité de la nature. Il nous a ouvert les yeux et nous a apporté la lumière pour voir la grandeur de notre champ d’action, notre mission est large et grande. De Laudato Si à Fratelli Tutti, nous lisons une volonté constante de construire un monde plus fraternel, fondé sur le respect des droits humains, la solidarité envers les plus pauvres et le respect de la création.
Sources:
1. Copyright © Dicastero per la Comunicazione – Libreria Editrice Vaticana
2. KTO télévision catholique, dossier le Pape à la rencontre de l’Europe. Publié le 30/7/2019.
3. Mission et Migrations/conférence des Evêques de France : le 01 décembre 2021