« Le Nigeria traverse actuellement le chapitre le plus sombre de son histoire », déclare la Conférence des évêques catholiques du Nigeria (CBCN). Mgr Lucius Ugorji de la CBCN a fait cette déclaration lors de la session d’ouverture de la deuxième plénière de la CBCN 2022, qui s’est tenue au Centre pastoral du Sacré-Cœur, à Orlu, dans l’État d’Imo. La montée en flèche de l’insécurité, du chômage et des prix des denrées alimentaires et des produits de base a rendu de nombreux Nigérians anxieux et il leur est de plus en plus difficile de se permettre de mener une vie décente. Les évêques ont été très clairs sur les causes de ces crises et leurs conséquences socio-économiques si elles ne sont pas traitées.
L’insécurité au Nigeria est complexe et multidimensionnelle, mais le conflit entre éleveurs et agriculteurs semble être l’une des principales dimensions du problème. Alors que le conflit s’inscrit dans un récit djihadiste fort, il est important de reconnaître qu’il y a d’autres aspects de l’histoire qui méritent l’attention et leur contribution au conflit. Parmi ceux-ci, les contributions climatiques et environnementales à ce conflit n’ont pas été suffisamment prises en compte dans les espaces politiques publics. Il est impératif de souligner que l’avancée du désert et le rétrécissement du lac Tchad obligent les éleveurs de la région du Sahel et ceux dont la subsistance dépend du bassin du lac Tchad à descendre vers le sud à la recherche de pâturages et d’eau pour leur bétail, et de terres fertiles pour les agriculteurs. Le ministre nigérian de la défense, le lieutenant-général Abdulrahman, s’est fait l’écho de cette position lors d’une récente interview. Par conséquent, la discussion actuelle du gouvernement nigérian avec d’autres parties prenantes pour régénérer le lac est effectivement un pas dans la bonne direction. Toutefois, il reste à voir comment cette déclaration sera suivie d’effets.
Certains rapports montrent que le taux d’accroissement de la désertification dans le nord du Nigeria est d’environ 0,6 km par an, et Nwafor (2006) estime la désertification à environ 351 000 km 2. Les pasteurs et les agriculteurs migrants sont conscients qu’ils susciteront la résistance des communautés autochtones qui se préparent depuis longtemps à la guerre. La situation est effrayante, et nécessite plutôt une réponse climatique appropriée de la part du gouvernement national du Nigeria. Il est donc important de faire la lumière sur la dimension climatique du conflit en cours au Nigeria.
Des défis tels que la désertification dans la région du Sahel ont préoccupé la Convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification (UNCCD). Le plan d’action pour la lutte contre la désertification soutient la CCD. Le Nigeria, qui fait partie des 10 pays du Sahel membres de l’UNISS, devra réfléchir et agir de manière plus collective pour relever ses défis en matière de sécurité. Le Nigeria fait également partie de l’action de la FAO contre la désertification. La construction de la Grande Muraille Verte offre une solution de fenêtre.
Cependant, le plus grand défi pour le Nigeria est la volonté politique de restaurer le lac Tchad. Il est de notoriété publique que les lacs ne se réduisent pas sans interférence sur leurs affluents. Il est également connu que des méga-projets tels que des barrages pour l’électricité, l’agriculture et d’autres soi-disant projets de développement ont été construits et ont obstrué l’écoulement de l’eau vers le lac. C’est un exemple clair de la façon dont les programmes et projets de développement étouffent les moyens de subsistance des gens qu’ils prétendent promouvoir.
À la lumière de ce qui précède, le gouvernement nigérian envisagera d’urgence de s’attaquer aux facteurs climatiques et environnementaux du conflit agriculteurs/agriculteurs et de s’affranchir du discours djihadiste. En effet, aucun mécanisme productif ne sera mis en place pour résoudre le conflit entre agriculteurs et éleveurs au Nigeria sans un recours approprié au divorce du mariage impie entre le récit djihadiste et les facteurs climatiques et environnementaux du conflit. C’est dans cette veine qu’AEFJN appelle le gouvernement national du Nigeria à agir sur la détermination climatique que vise la COP27 et à faire du lac Tchad un cas d’espèce pour les pertes et dommages.
Chika Onyejiuwa