Genre.  Comme chaque année, Bruxelles a accueilli les Journées européennes du développement (JED) début juin.[1] Le thème du forum de cette année, Femmes et filles au premier plan du développement durable, montre l’intérêt de l’Union européenne (UE) pour travailler sur le Programme des objectifs de développement durable à l’horizon 2030 et la nécessité de promouvoir et de défendre la pertinence des femmes dans le développement humain et économique de toutes les nations.[2] Comme dans d’autres secteurs tels que l’éducation et la santé, le rôle des femmes dans le développement du commerce et de l’investissement est essentiel, à la fois dans leur rôle en tant que consommatrices et dans les responsabilités que les femmes assument dans les processus de production.

Dans la culture africaine, le rôle des femmes est toujours beaucoup plus pertinent que dans les cultures occidentales. Dans les pays africains, les femmes sont responsables de maintenir et éduquer les enfants ainsi que des tâches ménagères, de la collecte de l’eau potable des puits communaux, du travail dans l’agriculture de subsistance et dans le petit commerce qui leur permet d’échanger leurs biens ou de les convertir en pièces de monnaie.

En général, les femmes en Afrique ont peu d’opportunités commerciales pour développer une carrière commerciale au niveau régional ou international. En dépit du rôle des femmes dans le soutien de leurs familles et de leur rôle de petites commerçantes dans la vie quotidienne des villes et des cités, sa pertinence est réduite et reléguée au second plan. Par conséquent, je considère que la protection et la promotion des femmes devraient être garanties pour la continuité et la durabilité du commerce en Afrique. Une protection qui passe par le respect des droits fondamentaux des femmes et qui assure la protection de leurs droits sociaux et professionnels au même niveau que les hommes.

Commerce

Le commerce international reste plus concerné par ses avantages à court terme que par le fait d’être un instrument transformateur des sociétés qui contribue à éradiquer la pauvreté et réduire les inégalités entre pays développés et en développement. Le commerce doit aussi être un élément qui contribue à réduire les inégalités entre les hommes et les femmes, spécialement dans les sociétés où le poids des responsabilités incombe aux femmes alors que dans ces pays, les paramètres patriarcaux de l’organisation de la société sont préservés.

Les accords de libre-échange de la nouvelle génération comprennent des dispositions pour atteindre les objectifs de développement durable (ODD).[3] Ces dispositions tentent d’inclure dans les accords commerciaux des chapitres relatifs à l’amélioration des conditions de travail décentes qui protègent les droits des travailleurs conformément aux traités internationaux.[4] En outre, les dispositions s’engagent à inclure des normes environnementales qui garantissent le respect de l’environnement et aident à réduire les effets néfastes des changements climatiques. Enfin, il y a un effort pour inclure des dispositions sur les droits humains qui offrent une protection aux communautés locales affectées par l’abus des sociétés transnationales et la corruption.

L’effort de l’UE pour créer une nouvelle sensibilité qui protège les droits des femmes et promeut l’égalité des sexes dans le commerce est souvent frustré sans une mise en œuvre efficace des dispositions qui encouragent le rôle des femmes dans les accords de libre-échange. C’est pourquoi l’Organisation mondiale du commerce a déclaré à Buenos Aires lors de la Conférence ministérielle de 2017 que si l’accès des femmes au commerce est facilité et si les barrières culturelles sont réduites, ces mesures aideront les femmes à devenir des agents de transformation de la société en réduisant la pauvreté et en générant une dynamique de la durabilité.[5]

La revendication du rôle des femmes dans toutes les sphères de la société ne peut pas être laissée dans des déclarations (conjointes) frustrées mais nécessite une justification spécifique qui mène à inclure des chapitres spécifiques de dispositions sur les femmes dans les Accords de Libre Echange (ALE) tels que les Accords de Partenariat Economique (APE) qui protègent les droits des femmes; droits qui commencent par quelque chose d’aussi fondamental que le respect des droits humains.

Le chemin vers la durabilité

Tout comme les conditions sociales et environnementales sont différentes entre l’Union européenne et ses partenaires commerciaux en Afrique, la situation des femmes dans les deux régions est aussi inégalement (non) protégée. Les droits des femmes dans les pays européens sont théoriquement bien protégés, mais les femmes doivent encore faire face à un manque d’opportunités et souffrir d’inégalité vis-à-vis des hommes ainsi que de discrimination dans de nombreuses positions.[6] Mais la réalité est plus dramatique en Afrique où d’ailleurs les femmes subissent un fort taux de violence et sont utilisées comme arme de lancement dans les conflits armés.

Pour toutes ces raisons, AEFJN préconise l’intégration de mesures spécifiques dans les accords de libre-échange qui protègent les femmes en général et dans les pays en développement en particulier. Ces mesures devraient garantir la dignité des femmes, renforcer leur rôle dans la société et promouvoir leur participation aux initiatives commerciales pour lesquelles les femmes ont souffert jusqu’ici d’un veto social.

L’UE devrait garder à l’esprit que la durabilité du commerce se réalise par des avantages économiques dans les transactions commerciales entre pays. et régions, mais aussi en facilitant l’accès à un travail décent pour toutes les femmes de tous âges, en concevant des programmes d’autonomisation des femmes, en facilitant l’accès à des programmes financiers spécifiques et en les protégeant contre toute forme d’abus. Les femmes jouent un rôle essentiel dans la voie du développement durable, en assurant la stabilité de la croissance économique et en développant des structures d’égalité. C’est une évidence que si les femmes gagnent, la société aussi. Et le commerce aussi.

José Luis Gutiérrez Aranda

AEFJN Policy Officer

[1] EDD est un forum international annuel organisé par l’Union européenne pour partager des idées et des expériences de manière à inspirer de nouveaux partenariats et des solutions innovantes aux défis mondiaux. https://eudevdays.eu/

[2] https://sustainabledevelopment.un.org/sdgs

[3] Document officieux de la Commission sur la mise en œuvre et l’application des chapitres sur le commerce et le développement durable dans les accords de libre-échange de l’UE http://trade.ec.europa.eu/doclib/docs/2018/february/tradoc_156618.pdf

[4] Conventions de l’OIT

[5] Déclaration conjointe sur le commerce et l’autonomisation économique des femmes https://www.wto.org/english/thewto_e/minist_e/mc11_e/genderdeclarationmc11_e.pdf

[6] L’écart de rémunération entre les sexes file:///C:/Users/admin_assistant/Downloads/ActionPlanonTacklingtheGenderPayGap.pdf Voir aussi Directive 75/117 / CEE, Directive 76/207 / CEE, Directive 79/7 / CEE