Le récent rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) des Nations unies est effrayant ! Ce rapport affirme sans équivoque que l’activité humaine, principalement économique, a réchauffé le climat à un rythme sans précédent au cours des 2000 dernières années. Il craint qu’une catastrophe n’attende l’humanité dans les prochaines décennies si des mesures urgentes et radicales ne sont pas prises à l’égard de la planète. Dans cette optique, des chefs religieux et des scientifiques, sous l’égide de l’initiative « Faith for Earth« , ont lancé un appel passionné aux gouvernements à l’occasion de la réunion COP26, les suppliant de prendre des décisions plus ambitieuses pour éviter l’effondrement du seul système de soutien de l’humanité. À quoi bon tout cet effort pour vivre sur Mars et sur d’autres planètes si nous ne pouvons pas préserver la planète Terre qui est  la nôtre. De même, des groupes de la société civile de différentes régions du monde ont demandé des engagements plus ambitieux en matière d’action climatique.

Les médias, eux aussi, sont tout aussi agités par les appels lancés aux différents gouvernements pour qu’ils prennent des engagements plus ambitieux lors de la COP26 à Glasgow, en Écosse. Malgré ces messages réconfortants, le langage corporel de ces gouvernements dit autre chose. Il n’y a aucune cohérence entre leurs vues sur le climat et leurs décisions politiques et économiques. La crise climatique d’aujourd’hui est le fruit des choix économiques et politiques d’hier. Par conséquent, si nous voulons empêcher l’effondrement complet du seul système de soutien de l’humanité dans les années à venir, il est impératif de faire des choix économiques et politiques différents. Il est tout à fait insensé de faire les choses de la même manière et de s’attendre à un résultat différent. Jusqu’à présent, il y a peu ou pas de cohérence entre les décisions économiques et politiques des différents gouvernements du monde occidental et leurs engagements climatiques. On a l’impression que la crise climatique et l’économie sont deux choses différentes et sans lien entre elles, ce qui est loin d’être le cas. En effet, non seulement elles sont liées, mais elles sont les deux faces d’une même pièce. Par conséquent, tout engagement climatique doit être en accord avec les choix économiques et politiques de tout gouvernement.

Il est providentiel et remarquable que ces processus intergouvernementaux se déroulent tous maintenant. Les échos qui nous parviennent de tous ces sommets et réunions permettent de voir facilement comment les choix économiques et politiques des acteurs étatiques sont incohérents avec leurs engagements climatiques. Le 23 septembre 2021, le sommet de l’ONU sur le système alimentaire était tout sauf à la hauteur de l’ambition pour l’agro écologie et des systèmes alimentaires locaux plus durables. C’était juste «  business as usual » où les entreprises chimiques industrielles et leurs lobbyistes ont pris le contrôle. Malheureusement, l’agriculture industrielle et les acquisitions de terres à grande échelle qui lui sont associées contribuent de manière significative au changement climatique. En effet, le GIEC souligne que l’agriculture industrielle est responsable de 21 à 37 % des émissions de gaz à effet de serre. Les produits chimiques qu’elle utilise sont par nature conçus pour tuer ou altérer les biosystèmes, et toute forme d’agriculture qui utilise des engrais chimiques perturbe l’écosystème et contribue à la crise climatique. C’est dans le même ordre d’idées, que le sommet « Finance in Common » a eu lieu le 19 octobre 2021. Les banques publiques de développement qui cherchent à investir de plus en plus dans l’agriculture sont bien connues pour être des sponsors de l’agriculture industrielle et de la recherche qui y va de pair. Dans le même ordre d’idées, les pays riches du Nord font obstacle à l’adoption d’un traité international contraignant qui rendrait les sociétés transnationales responsables de leurs destructions écologiques et de leurs violations des droits de l’homme, en particulier dans le Sud.

Il est alarmant et inquiétant que certains pays et entreprises fassent pression pour modifier un rapport scientifique crucial sur la lutte contre le changement climatique. Rien n’est plus honteux ! Ce genre de révélation remet en cause dès l’origine la crédibilité des résultats de la COP26. Leurs investissements économiques alimentent le lobby de ces pays et des entreprises. Il s’agit de choisir entre les intérêts financiers nationaux et le bien commun de notre système de soutien humain. Il semble que la Chine et l’Australie, par exemple, préféreraient l’effondrement de la planète que de bannir le charbon et les combustibles fossiles  de leur système d’approvisionnement énergétique. Tout cela  en raison de leurs énormes investissements dans ces domaines partout dans le monde. Il reste à voir quel sera leur bénéfice à vouloir tout gagner en perdant leur propre vie (Marc 8:36).

En effet, la racine de l’urgence climatique est éthique. Est-il possible d’avoir une éthique de vie qui soutient un bon environnement et promeut en même temps l’agriculture industrielle ? Nous avons une obligation morale envers les générations futures, qui doivent hériter d’une planète vivable et non des calamités que nous avons causées. Une fois encore, il est temps pour nous de prendre des décisions concrètes sur nos comportements de consommation, de vivre en harmonie avec la nature et de laisser à la prochaine génération une planète saine. C’est un impératif éthique d’une immense gravité pour lequel la postérité félicitera ou condamnera cette génération. Nous sommes arrivés au choix inévitable entre vie et la mort. En effet, c’est aujourd’hui le moment de briser ou de faire revivre ce que nous considérons comme notre espoir collectif !

Chika Onyejiuwa

AEFJN